3,9 milliards d’euros : c’est le montant que les Français dépensent chaque année en produits cosmétiques. Mais derrière ce chiffre, une réalité bien moins lisse : tout ce que l’on applique sur la peau ou les cheveux n’entre pas forcément dans la catégorie « cosmétique » au regard de la loi. Le règlement européen n°1223/2009 impose une définition stricte des produits cosmétiques, distincte de celle des médicaments ou des dispositifs médicaux. Pourtant, certains articles fréquemment utilisés, comme les dentifrices ou les solutions pour lentilles, échappent à cette classification malgré leur usage quotidien sur le corps humain.
Pour qu’un produit soit considéré comme cosmétique, la réglementation s’appuie sur trois piliers : l’usage prévu, la composition et les allégations. Il suffit parfois d’un changement d’indication ou de présentation pour faire basculer un produit d’une catégorie à une autre. Conséquence directe : les fabricants et distributeurs se retrouvent face à des obligations qui varient du tout au tout selon la classification retenue.
Comprendre la notion de produit cosmétique : définitions et enjeux
Le terme produit cosmétique ne laisse aucune place à l’à-peu-près. Le règlement (CE) n° 1223/2009 trace une frontière nette : est cosmétique toute substance ou tout mélange conçu pour être appliqué sur les parties superficielles du corps humain, peau, système pileux, ongles, lèvres, dents ou muqueuses buccales, dans le but de nettoyer, parfumer, modifier l’aspect, protéger, maintenir en bon état ou corriger une odeur. L’Europe a ainsi choisi de baliser un territoire précis, pour éviter l’amalgame avec le médicament ou le dispositif médical.
Ce qui compte, c’est la notion de superficialité du contact. Dès qu’un produit agit au-delà de la surface, via un effet métabolique ou immunologique, il sort du champ cosmétique. Voilà pourquoi un dentifrice, une crème hydratante, un parfum ou un vernis à ongles sont classés « cosmétiques », tandis qu’un antiseptique ou un patch pour arrêter de fumer n’en font pas partie.
La multiplication des substances utilisées a soulevé la question de l’effet cocktail : le cumul de multiples ingrédients auxquels nous sommes exposés au quotidien. Résultat : la vigilance s’est renforcée. De plus en plus, le principe de précaution s’impose. Les fabricants écartent certains ingrédients, même en l’absence de preuve irréfutable de toxicité. Derrière chaque formule, un arbitrage s’opère : nettoyer, embellir, protéger, mais sans sacrifier la santé. Face à des consommateurs de plus en plus informés et exigeants, industriels et marques sont poussés à jouer la carte de la transparence, tant sur la composition que sur les usages autorisés des produits cosmétiques.
Pour clarifier ces points, voici les trois axes majeurs qui définissent ce qu’est un produit cosmétique :
- Le cosmétique : conçu pour les surfaces du corps humain, sans effet thérapeutique.
- Le règlement européen : une démarche qui vise à renforcer la sécurité des consommateurs.
- Une attention constante portée à l’effet cocktail et au choix des ingrédients.
Quels critères distinguent un cosmétique des autres produits ?
La délimitation entre cosmétique, médicament et dispositif médical ne repose pas sur le simple bon sens. Le règlement européen énonce des critères précis qui ne laissent pas place à l’interprétation. Premier critère, le mode d’action : un produit cosmétique n’agit que sur la surface du corps humain, peau, cheveux, ongles, lèvres, et ne modifie pas les fonctions biologiques en profondeur. Un gel douche nettoie, une crème hydrate, un mascara colore. Mais dès qu’un effet thérapeutique, cicatrisant ou métabolique est revendiqué, le produit quitte le domaine du cosmétique.
La composition aussi est scrutée. La fameuse liste INCI (International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) doit obligatoirement apparaître sur chaque emballage. Certaines substances, en particulier des conservateurs ou filtres UV, sont explicitement interdites. Les mentions comme « sans » (parabènes, allergènes, perturbateurs endocriniens) sont autorisées uniquement si elles sont justifiées et objectives. Impossible d’afficher « sans allergènes » : aucun ingrédient ne peut être garanti sans risque pour tout le monde.
Quant aux allégations, elles sont sous surveillance. Un cosmétique promet de nettoyer, protéger, embellir. Les qualificatifs « hypoallergénique » ou « bio » doivent reposer sur des tests ou certifications reconnues. En Europe, la mention « non testé sur les animaux » est proscrite, puisque l’expérimentation animale est déjà interdite. Seules les informations exactes et loyales sont acceptées, la DGCCRF veille au grain.
Pour résumer, un produit cosmétique respecte systématiquement les points suivants :
- Agit en surface sur la peau, les cheveux ou les dents
- Ne revendique aucun effet thérapeutique ou métabolique
- Affiche une liste INCI complète et lisible
- Propose des allégations honnêtes, vérifiables, sans promesse médicale
Panorama des grandes familles de cosmétiques et exemples concrets
Les produits cosmétiques se déclinent en familles bien identifiées, chacune répondant à des usages définis par la réglementation et les attentes des utilisateurs. Les gels douche, shampoings ou dentifrices illustrent le segment des produits d’hygiène : ils servent à nettoyer la peau, les cheveux ou la bouche, sans prétendre soigner. Des crèmes hydratantes protègent la peau, des déodorants luttent contre les odeurs, tandis que rouges à lèvres, mascaras, fonds de teint et vernis à ongles relèvent du maquillage et de la modification de l’apparence.
Le parfum a un statut particulier. Il ne soigne pas, ne protège pas, mais transforme l’odeur de la peau ou des cheveux, conformément à la définition même du produit cosmétique. La demande pour des formules plus « naturelles » ou « biologiques » a également explosé : un cosmétique dit naturel doit contenir au moins 95 % d’ingrédients d’origine naturelle, et un produit certifié bio exige la même proportion, issue cette fois de l’agriculture biologique, avec des labels tels qu’Ecocert, Cosmebio ou Cosmos Organic pour garantir la traçabilité.
Pour visualiser les grandes familles et leurs spécificités, ce tableau récapitule les principaux exemples :
| Famille | Exemples concrets | Critère spécifique |
|---|---|---|
| Hygiène | Gel douche, dentifrice, shampoing | Nettoyage superficiel |
| Soin | Crème hydratante, baume à lèvres | Hydratation, protection |
| Maquillage | Rouge à lèvres, fond de teint, mascara | Modification de l’apparence |
| Parfum | Eau de toilette, brume capillaire | Modification de l’odeur |
Les consommateurs disposent aujourd’hui de nouveaux outils pour surveiller ce qu’ils achètent. Les applications et associations comme Yuka, INCI Beauty ou UFC Que Choisir passent au crible la liste des ingrédients, alertent en cas de substances controversées et mettent en avant les produits transparents ou labellisés. Les labels bio ou naturels rassurent, mais la vigilance s’impose toujours : la promesse affichée doit correspondre à la réalité du produit.
Déclaration et réglementation : les étapes clés pour un produit cosmétique
Derrière chaque produit cosmétique présent en magasin, un parcours réglementaire s’est imposé. Avant d’atteindre la salle de bains, le fabricant, distributeur ou importateur doit constituer un dossier complet et le déposer sur le Portail de Notification des Produits Cosmétiques (CPNP). Ce dossier regroupe la formule, le mode d’emploi, les données toxicologiques et l’étiquetage, le tout analysé par les autorités compétentes.
La sécurité reste le point de mire. Avant toute mise en vente, chaque formule fait l’objet d’une évaluation de sécurité par un professionnel qualifié : que la marque soit une multinationale ou un artisan, cette étape ne souffre aucune exception. Ingrédients, concentration, mode d’application, chaque détail est passé au crible. Lorsqu’un doute subsiste, les principes de précaution et d’équilibre entre risque et utilité guident la validation du produit.
Étiquetage et contrôle
L’emballage d’un cosmétique doit répondre à plusieurs exigences, détaillées ci-dessous :
- La liste INCI (International Nomenclature of Cosmetic Ingredients) doit être clairement présente sur le packaging.
- La date de durabilité minimale ou le PAO (Période Après Ouverture) doit signaler jusqu’à quand le produit garde ses propriétés.
- Des mentions comme « usage professionnel » ou « réservé aux professionnels » sont acceptées uniquement si elles sont justifiées et compréhensibles.
La DGCCRF contrôle régulièrement la conformité de ces obligations, traquant toute pratique commerciale trompeuse, publicité mensongère ou étiquetage défaillant. Les sanctions ne tardent pas à tomber en cas de manquement. Cette réglementation n’est pas un obstacle : elle protège à la fois la santé publique et la confiance dans un secteur où l’image ne doit jamais primer sur la sécurité. Un produit cosmétique, c’est la promesse d’un geste quotidien… mais aussi celle d’un respect sans faille des règles du jeu. Qui aurait cru qu’un simple tube de crème ou un flacon de parfum cachait un tel parcours d’obstacles ?


